Une pensée pour Lorca ce matin

Niño, déjame que baile.
Cuando vengan los gitanos,
te encontrarán sobre el yunque
con los ojillos cerrados.
Huye luna, luna, luna,
que ya siento sus caballos.

Por el cielo va la luna
con un niño de la mano.
Dentro de la fragua lloran,
dando gritos, los gitanos.
El aire la vela, vela.
El aire la está velando.




Ci dessus : Collage. Format 151 / 209 cm


Je me rappelais ce matin avoir travaillé pendant des mois et des mois sur le recueil de poèmes de Federico Garcia Lorca Romancero Gitano pour aboutir enfin à la grande exposition de l'Institut Cervantes de Toulouse.

Concion Otonal
libro des poemas
(extrait)


Todas las rosas son blancas,
tan blancas como mi pena,
y no son las rosas blancas,
que ha nevado sobre ellas.
Antes tuvieron el iris.
También sobre el alma nieva.
La nieve del alma tiene
copos de besos y escenas
que se hundieron en la sombra
o en la luz del que las piensa.

Y todas las rosas son
tan blancas como mi pena.

Ci dessus : Collage. Format 70 /90 cm


A propos de mon travail sur Lorca, Jean-Louis Augé, Conservateur en Chef des Musées Goya et Jaurès, a écrit :

Comment représenter Lorca ?

Le fait de mettre en image le texte littéraire ou poétique est une entreprise des plus ardues ; partir de l'image pour construire le discours s"avère quasi impossible sans tomber dans les lieux communs, les redites.

Nul ne peut contester la dimension et l'oeuvre de Federico Garcia Lorca ; sa fin est à l'image de sa vie où l'importance des thèmes comme l'amour à mort, le désir, le Soleil et la Terre se pétrit du lyrisme antique ainsi que de tradition populaire.

Comment figurer ces mondes, ces forces ? Olga Gimeno s'y tient par le biais de la gravure, par des collages de grandes dimensions. Autant dire qu'elle répond à l'impossible par la difficulté, car la plupart auraient choisi, bien entendu, de peindre. Elle nous propose donc un véritable itinéraire privé d'interdits (La casada infiel) où les poémes de Lorca et son Romancero Gitano trouvent leurs étonnantes places, leur univers colorés ou glacés par la lune.
Par grands aplats et traits de pointe sèche, par aquatinte, elle traduit l'impérieuse présence de la Vie (El macho cabrio) ou, au contraire, la moisson de la Mort qu'acompagnent les femmes dans le champ de blé. Autant d'images qui peuvent déranger et dérangent encore parce qu'elles sont fortes, profondes, puissantes comme la pensée de Lorca qu'ils ont tué puisqu'il avait tout compris.

Olga Gimeno a aussi entendu cette passion tragique, bien au delà d'aimables formes ou de l'esthétisme ; on y admirera son travail simple et efficace, l'amour de la ligne mais aissi les contrastes colorés comme l'Espagne sait les faire et nulle autre.
Une autre chose encore : y tout n'est pas tragédie puisque les ruisseaux de pluie sur les vitres de la fenêtre nous remémorent que leur parcours hasardeux, en apparence, ne peut s'interrompre. C'est ainsi qu'il fallait représenter Lorca ; lui qui est allégorie ne supporte aucune allégorie.